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Ali YAICI, les P’tits Cageots. Portrait

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La bioéconomie fait partie de l’ADN bordelaise. Engagée dans une agriculture citoyenne et respectueuse, la Nouvelle-Aquitaine est, en effet, le lieu de nombreuses initiatives qui mettent en avant le locavore et les circuits courts. Parmi les acteurs de l’économie alimentaire de proximité, Les P’tits Cageots sont incontournables. Existant depuis 2009 sur Talence, son fondateur Ali YAICI a travaillé douze ans sur le projet des P’tits Cageots. Ancien Parisien, avec une grande appétence pour le commerce équitable, Ali YAICI a toujours été un entrepreneur social, s’épanouissant à rendre concret des projets utiles : une aspiration à une consommation plus locale, biologique, qui ait du sens.

Une envie de faire bouger les lignes avec les P’tits Cageots

L’aventure entrepreneuriale d’Ali YAICI évolue dans un sens très concret, revoyant au terme même d’entrepreneuriat. En 2009, au moment du lancement des P’tits Cageots, le secteur du circuit court était naissant, il existait très peu d’initiatives, ancrés dans l’écosystème. Ali Yaici ne trouvait pas des débouchés commerciaux aux producteurs indépendants qui soient payés au juste prix. Les P’tits Cageots ont donc été créés de A à Z. Il fallait donc structurer quelque chose qui n’existe pas, sous la forme d’une entreprise d’insertion. 

Cette envie d’entreprendre est encore latente malgré la légitimité acquise par les P’tits Cageots au fil des années. A titre d’exemple, les P’tits cageots se sont lancés dans la production maraîchère il y a trois ans face au manque de production sur le territoire notamment pour les légumes. L’idée était de produire ce qui manquait sur le territoire. Sinon, Ali YAICI se fournit chez des producteurs déjà existants, dans le Lot-Et-Garonne.

Dans les circuits courts, l’entrepreneuriat peut résoudre des problématiques d’intérêt général. Par exemple, Ali YAICI, a fait de l’anti-gaspillage, une problématique d’importance. Des réflexions ont ainsi été menées au sein des P’tits Cageots sur la gestion des surplus alimentaire. Ainsi, Ali YAICI a mis en place un laboratoire de transformation pour la lactofermentation. Sa vision de l’entreprenariat rejoint donc l’action et le déploiement d’idées innovantes afin de démontrer que faire naître un projet viable économiquement dans les entreprises de l’ESS est bien possible.

L’entrepreneuriat social, un métier de passion

Les P’tits Cageots fonctionne essentiellement en ligne, de façon dématérialisée où les clients peuvent effectuer leurs commandes. Afin de maintenir un contact client, le magasin situé Avenue de Thouars à Talence, est ainsi conçu comme un point vente et un point de retrait des commandes, tandis que le service de livraison est totalement internalisé. En effet, pour Ali YAICI, il faut pouvoir casser la virtualité, une problématique qui concerne l’ensemble du secteur du e-commerce. L’Économie Sociale et Solidaire est également un secteur où l’entrepreneuriat prend tout son sens, des valeurs que les P’tits Cageots peuvent donner à voir et à faire vivre.

“L’agriculture c’est la nouvelle start-up”

Ali YAICI s’est également lancé dans le projet des P’tits Cageots avec la pensée que l’agriculture moderne a un bel avenir devant elle. Convaincu que l’agriculture moderne permet de faire vivre tout un écosystème économique et personnel, celui-ci s’appuie sur la création de valeur, la proximité avec les consommateurs et un environnement sain. C’est dans cette perspective que les lieux de production des P’tits Cageots vont à l’avenir être ouverts pour en faire des lieux de proximité, pour accueillir les visiteurs.

Quand une famille s’occupe du poulailler, les enfants attendent les oeufs des poules dont ils se sont occupées, et ne veulent pas d’autres oeufs. Une proximité se crée. L’agriculture moderne répond donc à des attentes de quêtes de sens. La communication des Ptits cageots est orientée dans cette perspective. La page Facebook sert uniquement à faire vivre la communauté, en communiquant sur des dons de légumes ou bien sur les salariés, par le biais du storytelling et de la rubrique “nos salariés ont du talents”.

Une équipe à l’image du concept entrepreneurial : sociale et solidaire

Véritable créateur d’emploi, les P’tits Cageots regroupent une quarantaine de salariés. Conventionnés par l’État comme entreprise d’insertion, les P’tits Cageots mettent en place un support d’accompagnement pour les personnes en difficultés. Vingt-sept salariés sont ainsi en contrat à durée déterminée  sur une durée maximum de deux ans, temps sur lequel doit s’effectuer l’accompagnement. Au sein de l’équipe, Camille est entièrement dédiée à cette organisation atypique : elle accompagne ces salariés dans leurs projets (encadrement technique) en identifiant les différents freins à l’employabilité que ce soit pour des besoins de formation, santé, garde d’enfant, mobilité etc. L’objectif d’une entreprise d’insertion est d’accompagner des personnes en situation de vulnérabilité pour leur permettre de rebondir en créant de la richesse collective.

“Les emplois doivent bénéficier à ceux qui en ont le plus besoin”

Ce conventionnement des pouvoirs publics représente moins de 10% des ressources des P’tits Cageots, ressources uniquement dues à la mission d’insertion. En effet, l’une des conditions pour pouvoir devenir une entreprise d’insertion, est de pouvoir montrer que l’entreprise pourrait être viable économiquement, en fonctionnant traditionnellement, autrement qu’avec les subventions. L’entreprise d’insertion est donc un choix, un investissement.

Les P’tits Cageots, la recette du succès

En 2019, le chiffre d’affaires des P’tits Cageots s’élevait à deux millions d’euros. Depuis sa création, l’entreprise n’a jamais fait face à un exercice déficitaire et affiche une croissance annuelle de 20 à 25%. L’entreprise n’est cependant, à l’heure actuelle, capable d’absorber une croissance supplémentaire et souhaite au contraire lisser l’activité tout au long de l’année. Il est plus simple d’être plus rentable en étant une entreprise classique mais la recherche de “richesse” n’est pas la même.  En témoigne, le très bon taux de sortie avec une insertion durable des salariés à hauteur de 90%. 

“La performance ne peut pas être qu’économique”. 

Ce taux de sortie révèle également la bonne santé de l’entreprise et sa pérennité, dans laquelle la notion de performance sociale est importante. C’est cette vision alternative de la performance qui fait des P’tits Cageots un démocratiseur de la question de l’accessibilité alimentaire. Étant indépendants du marché, les P’tits Cageots gardent une maîtrise des coûts afin de toujours garder un intérêt pour le producteur et le consommateur.

Une ascension locale remarquée 

La demande de circuit court est en pleine expansion. Le consommateur veut du pouvoir d’achat mais veut aussi exercer son pouvoir avec l’achat, c’est ce que décrit le terme consomm’acteur. 

Si la consommation n’a pas changé de formes depuis des décennies : voiture, parking, Ali YAICI reconnaît que le consommateur est “conscient que son acte d’achat influe sur la société”

Les modes de consommations alternatifs émergent et ont un fort potentiel pour peu qu’ils arrivent à se rendre accessible pour les consommateurs. Face à ces attentes nouvelles, le politique doit s’emparer de ces questions dans le contexte d’une prise de conscience collective d’un besoin du local et d’auto-suffisance alimentaire.

Cette ascension locale remarquée amène Ali YAICI à devoir faire un futur choix entre poursuivre le développement des P’tits Cageots c’est-à-dire doubler de taille ou au contraire accompagner une croissance maîtrisée. 

“Tous les éléments sont réunis pour faire un choix de développement de rupture.”

Des investissements seront nécessaires, notamment concernant l’intégration de nouvelles compétences (marketing, qualité produit, offre). Ali YAICI reconnaît, à ce titre, que le projet a été très soutenu par des structures porteuses de politiques publiques. L’aide la plus importante n’est pas forcément financière, elle réside dans le conseil et l’accompagnement, qui ont permis d’amener les P’tits Cageots là où ils sont aujourd’hui.

“C’est une chance : que les collectivités soient soucieuses de ces problématiques”

Un pari porté vers l’avenir

Habitant à Talence depuis la fin des années 90, l’ambition de Ali YAICI se trouve ici, à Bordeaux. La notion de circuit-court répond en effet à des conditions géographiques. Un déploiement national permettrait difficilement de réduire le nombre d’intermédiaires dans le processus de production et de distribution. Cette dimension locale à laquelle Ali YAICI tient est la clé du succès des P’tits Cageots dans ce secteur très concurrentiel.

Parmi les entreprises qui n’ont pas su appréhender le virage du circuit court, figure l’entreprise Paysans.fr qui a fait faillite en 2014 qui était présent sur le Lot-Et-Garonne. En parallèle, des géants commencent à s’y intéresser tel que “Pour de Bon” lancé par Chronofresh; La Poste qui garantissent aux clients une livraison frais du jour au lendemain partout en France. ll est donc crucial de prendre en compte ces nouveaux entrants dans les perspectives de développement des P’tits Cageots. L’entreprise reste locale avant tout, autant que possible biologique (près de 90%). L’objectif étant de tendre vers les 100%, même si le local est fondamental car il permet de ne pas se cacher sous le label “biologique” venant de pays voisins.

Du côté de ses aspirations personnelles, Ali YAICI souhaite poursuivre l’entreprenariat au sein des P’tits Cageots… Non pas comme gérant mais bien en tant que développeur, créateur. 

“Mon travail c’est de créer et partager. Nous ne sommes pas une entreprise, nous sommes un projet, parce qu’il évolue, se réinvente, grandit”.

Le développement de l’entreprise Les P’tits Cageots aux portes de la ville

Son ambition n’est pas d’être une entreprise nationale, ni de “franchise” ce concept. Ali YAICI préfère mettre à disposition le modèle économique des P’tits Cageots comme symbole d’une réussite. Dans cette perspective, la multiplication des initiatives autour du circuit court n’est pas perçue comme une menace. Au contraire, c’est le signe d’une émulation et de la création d’un véritable microcosme. D’autant plus, qu’il y a dix ans, rien n’était gagné. Aujourd’hui, le pari est gagnant.

Début septembre 2021, Les P’tits Cageots fait l’acquisition d’un terrain cultivable au Haillan. Ce dernier se situe à côté des pépinières municipales, offrant donc à l’entreprise de nombreuses possibilités. La première récolte dans cette future ferme urbaine biologique est attendue pour le printemps 2022. Depuis sa création, qui remonte à il y a 10 ans, l’entreprise marque un virage. Elle emploie plus de 60 salariés dont une grande partie en insertion. Par ailleurs, il ne s’agit pas de la première ferme urbaine biologique des P’tits Cageots. En effet, l’entreprise possède déjà un terrain à Léognan. Un terrain sur lequel elle cultive de nombreux fruits et légumes… Tous biologiques.

Cette initiative séduit de nombreux élus locaux. Ils encouragent cette création et font la promotion de ce fonctionnement. Nourrir la population bordelaise avec des produits locaux et biologiques… Que demander de plus ? Ce concept se développe, notamment dans les villes, pour proposer des solutions locales… Créer de l’emploi et favoriser la réinsertion… Mais aussi sensibiliser à l’alimentation saine et biologique. Un pari ambitieux, auquel les consommateurs bordelais se montrent sensibles.

Contact :

Ali YAICI – Les P’tits Cageots

244, avenue de Thouars 

33400 TALENCE

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