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Marché des médias : les business models des espaces médiatiques

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Comment est constitué le marché des médias et quel business modèle pour les nouveaux médias ? Dans le brouhaha informationnel, il est difficile de mesurer l’impact médiatique, tout autant que la réussite business des modèles liés à l’économie de l’information et de la visibilité.

L’essor de la publicité comme mode de financement des médias

Dès le 18ème siècle avec la naissance du premier quotidien, l’accès à l’information dépend principalement des médias papiers, avec l’achat d’exemplaires dédiés afin de connaître les informations relayées. C’est de la vente de ces supports que provient la majeure partie des ressources médiatiques. Avec la multiplication des supports, puis avec l’accès facilité à l’information, les sources de revenu se sont faites moins évidentes.

Dans le même temps, ces changements ont provoqué des modifications dans les habitudes de la population, induisant l’idée que l’information n’appartient pas à la catégorie des services pour lesquels on paie, comme si elle se fabriquait sans coût apparent. Face à cet état de fait, la publicité a peu à peu pris une place conséquente dans l’espace médiatique, devenant le mode de financement principal des médias et reléguant l’achat et l’abonnement à des sources de revenu résiduelles.

Selon les enquêtes régulières réalisées par l’IREP – l’Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires, les recettes publicitaires des médias sont en croissance depuis 2015, et malgré une diminution de ces recettes au 1er semestre 2015, la suite des statistiques montre une augmentation continue sur les années suivantes.

Si les médias tels que la télévision, le cinéma ou l’affichage connaissaient une croissance importante au premier semestre 2016 avec respectivement +2%, +11,8% et +4%, le digital connait une évolution importante l’année suivante, ce qui freine la croissance des médias plus traditionnels.

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La saturation de l’espace informationnel au bénéfice de la publicité

Depuis plus de 15 ans, face à la diversification des médias publicitaires et à l’attractivité des tarifs pour les espaces publicitaires, les annonceurs ont commencé à se tourner vers les nouveaux médias et à redistribuer leurs budgets.

Pour palier les dépenses dues à l’impression et proposer de nouvelles offres aux annonceurs, les médias ont développé un accès à leurs contenus via internet, mimant les pratiques du papier faute de pouvoir appréhender les nouveaux métiers et les nouveaux usages.

Cependant, avec la démocratisation et la banalisation des réseaux sociaux et de l’usage des moteurs de recherche (le search, notamment via Google), l’espace médiatique s’est vu emparé par de nouveaux acteurs et totalement éclaté. Les budgets pour la communication, en plus d’être réduits, se sont fractionnés sur la multitude de supports, limitant les revenus pour chaque espace. Ainsi, en 2016, on assistait à une légère baisse (continuelle) de l’investissement pour la publicité dans la presse en France avec une baisse de 6,7% par rapport à 2015, soit un budget de 2,286 milliards d’euros.

De même, la radio voyait ses rentrées d’argent tronquées de 1,3% pour se limiter à 712 millions d’euros. En revanche, cinéma, télévision et internet tirent leur épingle du jeu en augmentant leurs recettes publicitaire respectivement de 8,9 % (90 millions d’euros), 0.4% (3, 254 milliards d’euros) et 7% (3, 453 milliards d’euros), plaçant pour la première fois les dépenses sur internet en tête.

Crise sanitaire, accélérateur drastique des mutations des business modèles des espaces médiatiques

Bien entendu, la crise sanitaire change la donne et vient freiner massivement les investissements dans les médias. Ainsi, en 2020, le chiffre d’affaires du secteur s’établit à 13, 308 milliards d’euros. Soit une baisse de 11,6% par rapport à 2019. Ces chiffres incluent le périmètre observé par l’IREP (télévision, cinéma, radio, presse, publicité extérieure, annuaires,
courrier publicitaire, imprimés sans adresse) ainsi que les recettes internet (search, display, social et autres leviers calculés par l’Observatoire de l’e-pub SRI en partenariat avec l’UDECAM).

C’est la télévision qui affiche finalement la plus faible régression avec -11 % comparé à une année 2019 relativement stable. La radio a également vu ses revenus fondre de 12,7 %. En 2019, le média montrait pourtant une légère croissance de 1,7%. En revanche, c’est la presse qui subit le plus la crise sanitaire, accentuant plus que jamais la tendance des investissements à la baisse observés depuis plusieurs années. Ainsi, les recettes de la pqn, pqr, phr, magazines, presse spécialisée et gratuits chutent de -23,7%. Ils étaient déjà en baisse en 2019 avec -4,1%.

En comparaison, le digital des médias télévision, radio et presse affiche une baisse très contenue à -2,4% en 2020 par rapport à 2019. Des chiffres de l’IREP cohérents avec l’ensemble du marché, plutôt en faveur du digital.

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Financement des médias : le déclin des supports traditionnels au bénéfice du digital

Les différents médias permettent de percevoir une recette de 5,908 milliards d’euros selon les données de septembre 2017. Les écarts se creusent entre les médias traditionnels tels que la presse écrite ou la télévision, qui connaissent une chute inquiétante, et la publicité en ligne, qui, quant à elle, ne cesse de se développer.

Selon la 18ème édition de l’Observatoire de l’e-pub du SRI, réalisé par PwC, en partenariat avec l’UDECAM, les chiffres de 2017 surpassaient déjà régulièrement les prévisions dressées en 2016. En plus d’avoir dépassé les recettes de la publicité télévisuelles dès 2016, le digital poursuit son ascension (33% des investissements contre 28,3 pour la télévision). Ainsi, même si en 2020 sa croissance a connu un net ralentissement, elle s’est tout de même poursuivi. Le chiffre d’affaires du digital, porté par le Social et le Search, a alors augmenté de 4 %. A titre de comparaison, le taux annuel moyen de croissance s’élève à14 % depuis 2013. Néanmoins, cette baisse n’est pas permanente et à même était rattrapées dès 2021. Par rapport à 2019, le chiffre d’affaires grimpe de 29 %.

Search, Social et Display, les nouveaux « rois » de la publicité

Deux leviers du digital bénéficient largement depuis de longues années de ces investissements au point de ne laisser que des miettes aux autres. Le search (moteurs de recherche) représentait déjà en 2017 plus de la moitié (55%) du marché global pour presqu’un milliard d’euros ; et le display (publicité graphique sur internet, publicité vidéo, liens et pages sponsorisées…) 35% du marché et 644 millions d’euros. Les autres leviers se partageaient alors les 10% restants, augmentant tout de même leurs recettes chaque année.

De la même manière, 2017 marque en tournant dans les investissements media digital. Désormais, 41% des dépenses digitales sont réservées au search et au display sur mobile contre 29% au premier semestre 2016.

Néanmoins, depuis peu, le Social (publicité sur les réseaux sociaux) a pris une ampleur considérable. Ainsi, il occupe la deuxième place, devant le display depuis a minima 2019.

En 2021, malgré la crise sanitaire, l’ensemble des formats se porte bien. Le Search enregistre une croissance de +28%. Il pèse 42% du marché avec un chiffre d’affaires de 3 254 millions d’euros. Le Social occupe 26 % du marché avec une croissance de 22 % sur l’année. Le Display, touché plus brutalement par la crise, croît de 31% et s’établit à 20% du marché. Les autres formats, tels que l’affiliation, l’emailing et les comparateurs enregistrent une hausse de 8% et pèsent 12% du marché.

L’utilisation du mobile comme d’un média publicitaire est de plus en plus importante. À noter que les recettes réalisées par le biais du mobile augmentent encore, passant de 66 % en 2020 à 70 % en 2021.

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La monétisation de l’accès à l’information : la fin du modèle économique traditionnel des médias ?

La croissance de ces nouveaux supports entraîne des changements de modèles de diffusion et de consultation des informations.

En effet, de nombreux médias s’étant tournés vers le digital demandent au lecteur de s’abonner et donc de payer pour consulter des articles. Si certains ont souhaité conserver la gratuité de lecture pour maintenir leur lectorat, d’autres proposent la lecture d’un court extrait de l’article, ou un article gratuit par mois, l’objectif étant de développer les abonnements pour avoir accès à tous les articles. Un retour aux sources, où le lecteur payait pour accéder à l’information papier. Toutefois, la mécanique a changé, le lecteur étant habitué à accéder gratuitement à tous les contenus. Il éprouve alors un sentiment de frustration, entraînant l’effet inverse de celui recherché par les médias.

Afin de réconcilier le lecteur avec la presse papier, les médias proposent des solutions plus mixtes, avec la souscription à un abonnement. Grâce à ce dernier, le lecteur dispose d’un accès au site d’informations, mais aussi reçoit le support papier. De plus, les annonceurs ont de nouveau un espace qui leur confère une visibilité plus importante que sur internet.

Une façon de séduire les irréductibles lecteurs papiers autant que les amateurs du digital, tout en étoffant les sources de revenu de ces médias.

La guerre des contenus et de l’audience

La presse en ligne tente de se réinventer pour inclure les annonceurs publicitaires dans ses pages, en proposant des solutions à première vue intéressantes pour capter l’attention du lecteur. L’utilisation de titres très racoleurs en est un bon exemple. Mais lorsque le lecteur veut consulter l’article, il est confronté à des publicités parfois intempestives et pas en relation avec le contenu consulté. Une situation lassante, car il ne peut pas lire dans des conditions optimales, provoquant régulièrement l’abandon de l’article.

Le mobile est très touché par ces nouvelles pratiques, rendant la lectures d’articles impossible. Pourtant plus de 50 % des français se connectent à Internet depuis leur mobile depuis 2017. 55% en 2021. Les médias se livrent donc une véritable guerre de front pour capter l’attention de l’audience. Laquelle manifeste le besoin de pouvoir accéder au contenu, mais ne souhaite pas être submergée de publicités répétées et non ciblées.

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Part du trafic internet via mobile entre 2011 et 2021.

Face à la chute des recettes publicitaires, les éditeurs essaient de se diversifier. Le virage vers la presse spécialisée est apparu comme la meilleure solution, grâce à un marché présentant un fort potentiel et la force des marques. La projection sur plusieurs supports permet aussi de gagner une plus forte part de l’audience, qui a besoin d’innovation.

A l’heure où le renouvellement de son modèle économique apparaît comme une urgence, les médias ont tout intérêt à chercher de nouvelles sources de revenu. Tout en utilisant les outils disponibles pour revenir vers une croissance plus pérenne.

Enfin, face aux extraits d’articles, de multiples sources, du type Google Actualité, le contenu semble consommable sans acquisition d’audience. Les vieux démons ressurgissent… Un rempart bien fragile pour capter et retenir l’audience. Et si les choses étaient abordées sous un autre angle ? Une approche business : que veut lire / voir écouter l’audience choyée ? Et qui sont les annonceurs prêts à payer pour toucher cette audience justement ?

Sources

Le marché publicitaire français en 2016, IREP et FrancePub

Résultats annuels du marché publicitaire, IREP, mis à jour chaque année

Le marché publicitaire en France, Statista, mis à jour en décembre 2021

Observatoires annuels de l’e-pub, SRI et UDECAM

« 27ème Observatoire de l’e-pub », SRI et l’UDECAM

Infographie : les chiffres clés de la publicité digitale en France et dans le monde, La Réclame, mai 2016

Le marché publicitaire print et digital en 8 chiffres, Graphiline, décembre 2016

Les chiffres du marché de l’imprimé publicitaire, Graphiline, septembre 2016

“Le marché publicitaire français en 2016”, IREP – France Pub 2016, mars 2017

“Le marché publicitaire au 1er semestre 2017”, IREP, France Pub, et Kantar Média, 2017

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